Dans l’oeil de Yoko : #Episode 1- Préambule

Dans l’oeil de Yoko :   #Episode 1- Préambule

L’espace de notre dedans

« La maison est un lieu voué au culte du bien-être ; pour cela on la construit, on la bichonne. Mais l’on ne saisit pas l’intérêt de cette perspective sans remarquer combien elle requiert de soin pour la rendre cohérente avec ce que nous sommes, avec notre corps, nos besoins, nos désirs, qui exigent tant de nous. »

Alberto Eiguer (1)

La maison est un contenant vivant, vibrant et poreux comme j’aime à le rappeler, comme la peau l’est pour le corps. En se mettant à l’écoute de ce que raconte de nous notre maison, c’estpratiquement les pulsations de son cœur que nous pouvons entendre battre.

Vous serez parfois gêné par un agencement. Vous sentirez le besoin d’y remédier sans savoir vraiment pourquoi. Les pistes sont plurielles. Sachez juste que votre corps y impulse des gestes mécaniques, inconscients, et des mouvements naturels, qu’il est un « matériaux à mémoire » (2). Il est porteur d’histoire de vie, d’héritage familiaux, sociaux et culturels, voire plus encore. Et votre maison accueille tout de ce vécu corporel. Elle va même s’organiser et prendre forme autour. N’oubliez pas que vous vous êtes choisi.

Les murs, un continuum quasi morphologique et fonctionnel

Nos murs sont à l’image du plus grand organe sensoriel du corps humain : les fascias (3). Ils participent à la perception de nos mouvements et nos états internes au cœur de notre habitat. Parfois un petit appartement peut vous sembler grand et tellement vivant, et une spacieuse maison enfermante et triste.

Il est important de noter que ces mêmes murs cristallisent des immobilisations qui correspondent à nos propres crispations. Une énergie trop ample dans la maison peut s’avérer difficile à canaliser, s’il n’y a pas de meubles, d’objets, de couleurs, d’espace de rangement, qui lui permettent de ralentir son flux. Et potentiellement provoquer des dommages. D’où l’importance de s’investir lorsqu’on fait appel à un décorateur : le ressenti de l’habitant doit venir se tisser à celui du professionnel pour faire emerger une unicité. Le décorateur est comme un coach : il est là pour vous aider à formuler, à potentialiser et à faire émerger l’espace en sommeil en vous pour que vous soyez vous même chez vous.

Cette orientation globale d’une ambiance dans les lieux de vie, est directement en lien avec l’intention de celui qui l’a initié. Un agencement pourra convenir à certain et pas à d’autre pour un même espace.

Si l’une des directions se trouve limitée, ou en restriction, dans l’intériorité corporelle d’une personne, alors ses capacités, attitudes et comportements correspondants seront eux aussi limités dans l’espace habité et habitable de la maison. Je précise habitable car je pense également à la cave et au grenier qui jouent une importance capitale dans l’appropriation d’un lieu.

Une lecture similaire peut être faite dans les espaces de travail, mais ils ne seront pas évoqués dans cette série. Il est important de comprendre que certains mouvements peuvent être fluides dans une pièce et bloqués dans une autre. C’est alors que la symbolique des pièces nous permet de comprendre ce qui se joue.

L’assimilation de la maison au corps humain n’est pas récente. On y reviendra dans les épisodes suivants. Et qui dit corps, dit sens. Les pièces de la maison nous permettent de développer notre intelligence sensorielle et kinesthésique (4). Tous nos sens sont sollicités.

Le goût dans la cuisine et la salle à manger, la vue et l’ouïe dans le salon, l’ouïe et le toucher dans la chambre et la salle de bain, l’odorat dans la cuisine, la salle de bain et les toilettes, le sens intéroceptif (5) dans l’entrée, le sens vestibulaire (équilibre de l’oreille interne) dans les escaliers, les balcons ou terrasses en hauteur, le sens proprioceptif dans les dégagements et dans la fluidité de déambulation à travers la maison. En bref un vrai voyage sensori-moteur.

La fluidité de circulation dans la maison est un scanner de notre propre perception de notre intériorité, de nos contours, et de notre rapport à l’extérieur. La maison nous offre des informations précises d’un nous intime, sacré, authentique, profond et parfois plein de paradoxes. Elle ne peut être réduite qu’à sa seule dimension sociale et d’apparence.

Dans le prochain épisode de l’œil de Yoko, l’entrée sera à l’honneur. Alors à très vite !

Des questions ? Des interactions ? N’hésitez pas

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(1) Enfance et psy, Alberto Eiguer, ed.Erès

(2) Retrouver l’intelligence du corps- une urgence dans nos organisations et nos modes de vie– Eve Berger Grosjean -ed.Interedition

(3) Fascias, le nouvel organe clé de votre santé, Christian Courraud – ed. Leduc Pratique. Des articles ciblés sont également disponibles sur CERAP.org sur les travaux du Pr.BOIS

(4) Qui se rapporte à la perception des déplacements des différentes parties du corps. Ce sens est très en lien avec la proprioception

(5) C’est la perception des sensations corporelles et de l’état interne du corps